Allez sur le blog : a.qc.lu
Réveil en sursaut. On me secoue l’épaule. Aveuglé par la lumière crue, il me faut quelques secondes pour reprendre mes esprits. Autour de moi, une demi-douzaine de militaires. Un coup d’œil sur la montre de l’un d’eux ; il est près de 21 h 30. Ils m’ordonnent de vite rassembler mes affaires. D’une main, j’attrape le très peu de choses que j’ai. D’un geste prompt, je récupère discrètement mon petit couteau suisse caché sous une couverture. On me saisit par le bras pour m’escorter hors de ma chambre. Je suis conduit dans un cachot sale et délabré. Dans le couloir décrépit qui y mène traînent de vieux instruments rouillés servant à attacher poignets et chevilles. Dans le cachot, il n’y a qu’une couche avec un oreiller, une couverture et des moustiques agressifs. Pas de fenêtre, seulement deux lucarnes grillagées, une au sol, l’autre au plafond. On ferme la porte à l’aide d’un gros vieux cadenas. Avec sa petite ouverture à barreaux, la lourde porte me toise.
Dans cette oubliette, la chaleur est épouvantable. Je suffoque. Chaque minute se fait plus pesante que la précédente. Dans ces conditions, je crains ne pas pouvoir survivre longtemps. La nuit, la température est à peine plus clémente. Un néon blanc demeure allumé continuellement. Impossible pour moi de dormir avec la lumière, mais heureusement, dans mon peu d’affaires se trouve mon caleçon, que je peux attacher autour des yeux.
Le lendemain matin, je tente de méditer, mais c’est difficile avec un esprit privé de toute quiétude. Pour le menu, une petite assiette de riz le matin vers huit heures et une petite assiette de riz avec une seule cuillère de pois ou de légumes vers onze heures. Je ne mange pas à ma faim. Ma promenade quotidienne se résume à une sortie éclair pour une douche et un tour aux toilettes. Le lendemain, pas le droit de sortir. Pour uriner, on me donne une bouteille en plastique.
Le pire, c’est de ne pas savoir combien de temps je vais devoir rester ici. L’incertitude est un véritable supplice. Un cauchemar que je faisais souvent enfant refait surface : je me retrouve enfermé seul dans une cave, condamné à y rester pour l’éternité. Sauf que cette fois, c'est la réalité ; je ne vais pas me réveiller. Sur le mur, les détenus précédents ont gravé des phrases exprimant leur désespoir, combien le foyer familial les manque. D’autres se sont contentés de marquer les jours. Certains sont restés six mois, d’autres dix. Plus moyen de méditer. Je tourne en rond. Mes pieds sont noirs. J’ai peur. J’angoisse. Je ne sais plus quoi faire, plus quoi penser. Pour la première fois de ma vie, je ne crois plus avoir un bon karma, je perds foi en mes anges gardiens qui, d’après moi, faisaient que je m’en sortais toujours bien.
Comme vous êtes en train de le faire en ce moment, j’ai souvent lu des récits de personnes emprisonnées, tentant d’imaginer ce qu’on peut éprouver. En le vivant, je m’aperçois que c’est impossible de concevoir à quel point c’est vertigineux. J’aurais préféré une bonne rouste ; le lendemain, la douleur s’évapore, on n’en parle plus. L’isolement forcé à durée indéterminée, c’est une violence qui persiste.
Derrière la porte de mon cachot, je découvre une drôle de surprise. Mais avant de poursuivre, je dois vous parler de cette fille dont le sourire suffisait à mon bonheur. C’est avec elle que tout a commencé…
(à suivre…)
Une fois ce livre achevé, je tenterais de le publier.